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Tout en rapidité


Moi, c'est Anne-Sophie, je suis la maman de Raphaël, j'ai 31 ans et je suis préparatrice en pharmacie à l'hôpital. Son papa est analyste moteur et va prendre 32 ans.

Nous sommes actuellement séparés. Il n'est pas toujours évident de trouver sa place lorsque bébé entre dans nos vies, mais notre entente est bonne. Nous faisons au mieux pour notre fils qui est notre priorité.












Par où commencer ? La conception ? J'étais si pressée de tomber enceinte. En un mois et demi c'était plié... RAPIDE. Comme la fin de cette aventure, mais à ce moment là, je suis à 1000 lieux de me l'imaginer. La grossesse ? Longue. Douloureuse. Stressante.

J'ai du mal à m'y mettre dans cette grossesse. Tout le monde me dit : "c'est merveilleux ! tu sens la vie en toi". Personnellement, ce que je sens, c'est les nausées, les coups de pieds. J'adorais pourtant sentir ses premiers coups, ses petites bulles dans mon ventre. Mais, je ne ressens pas, cette magie qui grandit en moi comme je me l'imaginais. Je sais pourtant qu'il est là. Nous cohabitons. Je lui parle au quotidien, lui raconte les journées qui nous attendent. Mais, je ne lui dis pas que je l'aime de tout mon coeur... Parce que ce n'est pas vrai. Je ne ressens pas cette vague d'amour dont tout le monde parle… non. Je m'en veux mais je n'y arrive pas. Je me sens perdue dans ce corps que je vois évoluer. Je pleure de ne pas me reconnaître. Je ne me sens pas rayonnante.

7ème mois de grossesse : Une nouvelle couche de culpabilité vient se rajouter sur mes épaules : Les contractions ! Avec une petite surprise supplémentaire : " Votre bébé est très petit. Nous allons devoir faire un contrôle tous les 15 jours." Je ne suis pas inquiète. La sage femme me le confirme : " Ce n'est pas inquiétant. Toutes les mesures sont petites. Ce n'est pas comme s'il avait qu'un membre de petit." Les contrôles tous les 15 jours passent finalement à des contrôles hebdomadaires… L'inquiétude commence à monter au fil des jours. C'est trop pour mes épaules. " QU'EST CE QUE J'AI FAIT ? " Je n'arrive pas à être folle amoureuse de lui... J'ai profondément besoin que cette grossesse se termine… Je me sens responsable de tout. Pardon… pardon mon bébé... J'essaie de me rassurer, de rationaliser ce que je vis : " Oh le papa était tout maigre ! Il tient de son père c'est tout ! " Mais mon inconscient ne peut s'empêcher de m'envoyer des : " Non ! Il y a un truc qui cloche ! " Pendant ce temps, je me sens si mal dans mon corps. Je grossis, j'ai honte d'annoncer mon poids à chaque consultation. Tout le monde me dit que je ne prends que du ventre mais, moi, je me vois énorme. Pourtant, ce ventre, qui m'est si difficile de voir s'agrandir, je ne peux m'empêcher de le toucher, ma main le caressant à la moindre occasion. 7 mois et demi de grossesse : Dame tension fait son entrée ! " Encore un nouveau truc de chiant dans cette grossesse ! " Je suis de nature stressée, alors que ma tension soit élevée, rien d'étonnant en soi. Je ne suis pas inquiète. A moi, les chaussettes de contention ! La pré éclempsie ? Ca ne me viendra pas une seule fois à l'esprit. Les monitos et échographies s'enchaînent. Mon fils est mesuré en long, en large et en travers. Et toujours le même discours : " il est petit " … " Il est petit et pas gros. " Je suis si partagée à l'écoute de ces mots. J'ai peur pour mon bébé. Vraiment. Mais l'accouchement m'effraie tellement. Je m'imagine que s'il est petit, ce sera peut être plus facile. Fin novembre : " Bon.. On va réunir le conseil. On vous appellera lorsqu'ils auront regardé et étudié votre dossier. " MERDE. 3 décembre : " Venez le 5, comme d'habitude, monito et écho.. Vous reviendrez le 7. Si à ce moment là, il n'a pas grossi, vous serez déclenchée. " Nous somme le 3. Date de mon terme : 25 décembre. Jeudi 5 décembre : Je pressens quelque chose. Alors, je fais le ménage, je clôture ce que je dois finir. Je prépare quelques repas pour le papa et termine ma valise. Un dernier bisou au futur papa et lui dis : " Bon, je pars au monito. Encore. Je te tiens au jus. Ma batterie est pleine. " J'arrive à l'hôpital. Pas de place de parking. Je me garre 2 rues plus loin et râle rien qu'à la vue de la montée qui m'attend pour le retour. 13h30: On m'installe pour le monito. Les contractions sont là. Je suis sereine, j'ai l'habitude. Tout ça devient ma petite routine. Je suis à 1cm depuis 3 semaines et rien ne bouge… Les sages femmes défilent, me font la causette. Avec une visite par semaine, il faut dire que tu crées forcément des affinités. Ce jour là, il y a pas mal d'urgences. La maternité est pleine.. Alors, mon écho attendra. Je patiente sous monito. 16h: Toujours pas d'échographie. C'est long. J'attends que tout ça se termine pour rentrer. En espérant ne pas louper le début de top chef. Tout est comme d'habitude. Mes contractions. Le coeur de bébé. Je prends mon mal en patience. Une sage-femme me demande de m'installer sur le côté. " Rien de grave. Votre fils présente quelques ralentissements." Par contre ma tension, elle, est très élevée.. 18h: Concernant mon fils : Toujours des irrégularités. Toujours rien d'alarmant. " Mais votre tension ça ne va pas du tout, du tout. Vous serez peut être déclenchée ce soir. On attend le verdict du gynécologue… De toute façon vous avez beaucoup de contractions et vous êtes à 1 cm depuis des semaines. Il faut juste un petit coup de pouce à mon avis." me dit la sage femme. Au cas où, elle me fait une prise de sang, et laisse le cathéter. " Comme ça c'est fait ! Je vous embête plus. " " Je vous allume la télé ? " Soyons fou. Visiblement, j'en ai pour un moment.. 18h20: J'entends le gyneco derrière la porte: " ...il faut annoncer à la dame qu'on va la déclencher ce soir, on peux plus attendre là..." on parie que c'est pour moi ? TOC TOC TOC. La porte s'ouvre. " Je suis désolée mais nous allons vous déclencher par tampon dans quelques minutes. Si à 21h rien ne change, vous monterez en chambre et nous vous ferons des examens cette nuit. Ne soyez pas pressée. C'est votre premier, ça prendra sûrement beaucoup de temps. A mon avis, il y aura la perfusion demain." Bon. On y est. Ca y'est. Je suis soulagée. Forcément un peu inquiète de tout cet inconnu qui m'attend mais, avec la péridurale, je sais que ça ira. J'imagine qu'il est donc temps d'appeler mon mari. " - Allo ? Bon, et bien, je reste là. Ils vont me déclencher. Tu ramènes la valise s'il te plait. - Je dois venir, alors c'est ça ? - Oui j'accouche là. C'est ce soir que tout commence. - ... j'arrive vite." 19h: pose du tampon. La sage-femme nous explique tout, à moi et à mon mari. Elle est d'une grande bienveillance. Elle me demande la permission de commencer et fait ça en douceur. 21h: Je suis toujours à 1cm. Les contractions sont douloureuses mais tout à fait supportables. Comme rien ne bouge, on nous installe en chambre. Papa s'endort vite.. Moi aussi. mais pas pour longtemps. Des contractions douloureuses me réveillent. Je me lève je marche, je respire... Je fais les 100 pas. Je gère. J'ai l'habitude avec mes crises de coliques néphrétiques. Ca ne peut pas être pire de toute façon. 23h30: Mon mari me propose d'aller à la maternité. " Non, non, je gère. J'ai un contrôle à 00h30 de toute façon. J'attends. " 00h : " Viens, on y va ! J'ai trop mal là ! " C'est reparti. Monito. Toucher vaginal. " Toujours à 1 cm Madame. Mais, vous allez rester là sous monito... En attendant, papa, massez lui le dos. Accompagnez la dans les contractions..." " - Ca te fait quelque chose que je te masse le dos ? " " - Non, non. Ca me saoûle plus qu'autre chose. Arrête. Mets moi de la bombe dans le cou plutôt, s'il te plaît. '' 1h : La sage femme revient. Toucher Vaginal. " Toujours à 1cm, Madame. Allez marcher, ça va aider. Si jamais vous avez mal en revenant, prenez une douche chaude." Okay. Allons chercher la valise dans la voiture. Je n'irai pas plus loin que l'ascenseur. Je ne peux pas marcher. J'ai trop mal. Je suis là, prostrée dans le hall d'entrée, sous les yeux médusés des agents de sécurité. Tu m'étonnes, une femme enceinte attendant son mari parti chercher la valise, au milieu de nulle part, se tenir le ventre et ne plus bouger, ça fait flipper. 1h30: Nous sommes remontés en chambre. C'est douloureux, mais je gère toujours. Je me déshabille et file sous la douche. Je laisse couler l'eau chaude, très chaude... Je sens plus les contractions. LE BONHEUR 1h45 : PLOC 1h46 : 1 minute. C'est le temps qu'il m'a fallu pour réagir. " Bouuu ? Appelle la sage femme j'ai perdu les eaux ! " " Qu'elle sorte de la douche. J'arrive d'ici 10 minutes." Les contractions sont revenues très très violentes. Des coups de poignard. Je ne peux plus sortir de la douche. Mon ventre est dur et déformé. Je perds pied. Totalement. " Putain ... Si tout à l'heure, l'eau a calmé les douleurs. Comment ça va être si je sors de la douche...? " La SF arrive enfin, avec un fauteuil et m'emmène en salle de travail. Elle m'osculte : 3cm. " - C'est à partir de quand la péri ? - Maintenant, mais il y a personne pour la faire et pas de salle, il faut patienter..." Je panique, pleure et répète à qui veut bien l'entendre : " ooh nooon ... oh nooon ... S'il vous plaît viiite ! s'il vous plaît ! " On me demande de rester allongée sur le côté gauche pour que bébé ne souffre pas. J'hurle de douleurs. Je veux que ça s'arrête. Je veux qu'il sorte vite. Les contractions sont si douloureuses et ne me laissent aucun répit. L'équipe se demande s'il ne faudrait pas me poser la péridurale dans la salle de pré-travail. Et là, le cauchemar commence. La sage femme cherche le pouls. Mais pas le mien. Une deuxième sage-femme arrive. " - Euh... tu as vu le rythme, là ? - Oui oui je cherche..." Mes jambes lâchent. Je suis trop faible. Je ne comprends plus rien. Je n'écoute plus. Les contractions s'enchaînent. Sans pause... Une troisième sage-femme entre. " - ça ne va plus. On n'a plus de rythme. - Oui je sais ! Je le cherche ! - Tu as osculté ? Y'a pas de cordon ? - Non, non. Y'a rien ! ". Pendant ce temps, papa est par terre, jambes en l'air. Il gérait pourtant bien. Jusqu'à "on a plus le cœur du bébé" 2h20 : " J'en peux plus. Faites quelque chose. Je veux la péridurale. S'il vous plait ! Je vous en supplie." Ces satanées contractions s'enchaînent. Aucune pause. Aucun répit. 2h30: Toucher vaginal. Je suis à 6. Ca va trop vite pour le bébé. " Ecoute moi chérie, ils n'ont plus le cœur du bébé. Concentre toi stp. Laisse toi ausculter." J'hurle. J'ai mal. Je ne supporte plus les touchers vaginaux. Il faut me sortir le bébé de là. Je n'ai plus de force. Je ne peux plus tenir. 2h45 : Le gynéco entre en courant. Il me force à écarter les jambes pour un énième contrôle. Il n'y va pas de main morte. " Elle est à 8. On a plus de rythme. CODE ROUGE. Préparez la salle de césarienne." On m'enlève les bijoux, les lunettes et tout ce qui est inutile. On m'osculte une dernière fois je suis à 10cm. Je n'ai pas de péri. J'hurle. Tant pis pour ma dignité. Je veux que ça s'arrête. VITE. Au milieu de tout ça, j'entends un : " vous restez là monsieur ! " Je ne suis pas encore dans le bloc. Je suis dans le couloir. Et j'ai besoin de pousser. Je leur dis. Personne ne semble m'écouter. Mais c'est plus fort que moi. Je pousse. Je ne peux pas faire autrement. On m'installe sur la table. Je pleure. J'ai mal. J'ai si peur. Le gynéco m'ausculte une dernière fois. " Il est engagé. Je ne peux plus le sortir. Il va falloir pousser et le sortir comme ça." Je pleure. J'hurle que ce n'est pas possible. Je n'y arriverai pas. Une sage femme me prend la main, une infirmière de la salle de réveil me serre l'autre : " SI ! Vous êtes fortes. On est là, vous pouvez le faire ! " Alors j'ai poussé. Le plus fort que j'ai pu. 3 fois. La troisième il était là. Moi qui ne voulait pas en entendre parler, je ne voulais finalement que ça : Attraper mon bébé. Il est 3h05. Je l'ai fait. J'ai accouché. Sans péridurale. Je n'ai tenu dans mes bras que quelques secondes mon bébé. Il ne respirait pas et était violet. Le temps d'un bisou et il a pris le chemin de la néonat. Mes émotions sont en vrac. Je suis sonnée par mon accouchement. Je suis soulagée que tout ça soit terminée. Je suis si inquiète pour mon bébé que je n'ai pas entendu pleurer. Je suis honteuse d'avoir tant hurlé et me confonds en excuses auprès des soignants. Je suis déçue de ne pas avoir vécu tout ça avec mon mari. Je voulais tant que nous découvrions notre fils en même temps. Je suis si loin de l'accouchement parfait que je désirais. Je ne suis remontée en chambre qu'à 6h. Mon bébé de 2kg440 pour 45cm m'a rejoint dans son berceau, remonté de la néonat par son papa. J'ai accouché de la pire façon à mes yeux. J'avais si peur d'accoucher sans péridurale, que j'ai répété tout au long de ma grossesse : " Surtout je veux la péri ! " Mais aujourd'hui je me dis que je l'ai fait. Et surtout, aujourd'hui, mon bébé, je l'aime à en crever.


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