top of page

Une surprise inattendue


Moi, c'est Manon, la curiosité incarnée. Lui, c'est Daniel, un mélomane assumé. Et le mini, c'est Raphaël, un bon mélange des deux. Nous sommes une jolie famille mixte pleine d'amour et de bons sentiments. Parents depuis peu, nous cheminons sur ce chemin de vie entre famille, nounou, boulots, parentalité, couple, amis, reprise d'étude, etc. C'est fatiguant, c'est dense, mais nous n'échangerions nos places pour rien au monde.




Après le mariage, l'achat de la maison, c'est très rapidement que bébé s'est installé, à mon grand étonnement. Nous partons en voyage de noces en Crète au mois de juin. Je suis alors enceinte de 2 mois. Nous profitons de ces vacances en mode slow life. J'ai la chance d'être épargnée par les nausées, par contre la fatigue, elle, elle est bien là ! Au détour d'une conversation, je dis à mon mari tout neuf, que je le sens, ce sera une fille ! J'en suis sûre !


12 juin, 19h : Retour du voyage de noces et veille de la T1 Petit détour aux toilettes avant d'embarquer, et là, l'horreur. Je découvre du sang. Bien rouge. Non ! Je ne veux pas perdre mon tout petit. J'ai peur. Je panique. Je remercie la vie de me laisser être ta maman même si ça tout peut s'arrêter aujourd'hui. J'ai mal en moi. Mon mari est, lui, d'un calme olympien. Je bourre ma culotte de papier. Le saignement semble diminuer. Je sors des toilettes et le dis à Daniel. Il est aussi préoccupé mais, pragmatique. Il essaie de me/nous rassurer : " Il a fait chaud. " " C'est peut être juste passager. " " Ca va certainement s'arrêter de saigner." Question pratico pratique, je me mets à chercher des serviettes hygiéniques dans l'aéroport. Je dois pas être la seule femme à en avoir besoin et à devoir prendre l'avion. A priori si. Je ne trouve RIEN. QUE DALLE ! Scandaleux Pendant le vol, je me rends plusieurs fois aux toilettes pour vérifier. Les saignements semblent s'être arrêtés. Je me rassure et me résonne : 1. Il n' y a plus de sang. 2. On a rendez-vous demain matin. C'est qu'une question d'heures ! pas la peine de se précipiter en pleine nuit aux urgences. Nous atterrissons en France vers minuit. Le temps de récupérer les bagages, de regagner la voiture, nous retrouvons notre domicile aux alentours de 3h. Dans un peu moins de 5h, nous avons rendez-vous pour notre première échographie. 13 juin, 8h30 : Nous sommes dans la salle d'attente. Je suis stressée. J'ai peur, mais j'ai envie de savoir. Il n'y a plus de saignements mais est ce que tout va bien ? L'échographie débute. On entend son petit coeur. Tout va bien. Nous sommes si soulagés. Notre bébé va parfaitement bien ! Nous repartons sereins et commençons à chercher des prénoms. Quelques prénoms de filles ressortent, mais absolument rien pour les garçons. Les semaines passent. Nous commençons sa future chambre. Elle sera blanche et bleue, avec un lustre rose. Parce que, après tout, tout bleu ou tout rose, ce n'est absolument pas "nous". 20 août : Jour de la T2 Aujourd'hui, je suis à quatre mois et demi de grossesse et nous allons revoir notre bébé et peut être connaître son secret. " C'est une petite fille ! " Nous sommes contents. Garçon ou fille, nous n'avions pas de préférence. Le principal c'est que tout aille bien pour notre bébé. Je vous l'accorde, une petite satisfaction personnelle se fait quand même ressentir. Mon intuition était la bonne. " En revanche, la petite est en bas des courbes. Elle est au 10,5 percentile. Selon l'échographe, les échanges entre elle et moi ne se font pas bien : le Doppler du cordon n'est pas terrible mais pas inquiétant. " Je ressors de ce rendez-vous inquiète. Pleine de culpabilité. Malgré les propos rassurants de la sage-femme : " Rien n'est inquiétant à ce stade ! Il faut juste surveiller sa croissance." On nous donne rendez vous dans 1 mois pour une échographie de contrôle. 20 septembre : échographie de contrôle des 6 mois C'est avec pas mal de stress que nous nous rendons à cette échographie. J'ai peur qu'elle soit trop petite, qu'elle n'aille pas bien. En plus, je ne prends pas vraiment de poids, mon ventre n'est pas très prononcé. Je suis vraiment inquiète. L'échographie est parfaite. Notre petite fille grandit bien ! Nous sommes heureux. Je commence à me projeter. Je l'appelle par son prénom, Alice. Je lui parle. Je lui promets de faire de mon mieux pour qu'elle puisse devenir la personne qu'elle souhaite, et ce, peu importe les diktats de la société. 29 septembre : Jour de la T3 Tout va bien. Je suis rassurée. Elle grandit très bien. Elle est finalement pile poil dans les courbes, malgré mon diabète gestationnel que nous avons découvert il y a peu. On nous annonce un bébé de 3,4kg à terme. Peu de temps après, je suis arrêtée. Ce qui me laisse le loisir de finir de préparer ses affaires. Pour l'instant, nous avons beaucoup de neutre. Le papa me pousse à acheter des choses plus colorées. Petit tour sur Vinted, " problème" résolu. Quelques touches de rose viennent s'ajouter à sa garde robe. 29 novembre : échographie de contrôle des 8 mois En début d'après midi, nous prenons le chemin de notre rendez-vous. Je suis sereine. Elle bouge bien. De mon côté, je n'ai pris que peu de poids. Il n'y a pas lieu de s'inquiéter. L'objectif de cette écho est de vérifier que sa croissance n'empêche pas un accouchement par voie basse. Notre sage-femme, échographiste, nous laisse nous installer et nous présente l'étudiante qui l'accompagne. "Tout va bien? Elle ne grossit pas trop ? Elle est estimée à combien à terme ? " je demande. " Tout est parfait ! " Puis, " Je vous avais dit que c'était une petite fille ou un petit garçon ? " Mon mari et moi nous regardons et répondons ensemble : " Une petite fille ! " Microblanc. Elle poursuit en nous montrant l'écran : " Ah non ! Ce n'est pas une fille, c'est un petit garçon." Le temps semble se figer. Je suis stupéfaite. " Mais c'est une blague ? " " Vous plaisantez ? " " Non, vous me charriez là ! " " Non non. " répond la sage-femme embarrassée. Mon mari et moi explosons de rire. Une franche rigolade. On est plus que surpris, mais on s'en fiche. Nous souhaitions un enfant en bonne santé, et il est ! C'est le principal. Mais à ce moment là, intérieurement, j'ai l'impression de me couper de mon bébé. Surement mon moyen de me défendre face à cet événement si déstabilisant. Dans moins d'un mois, notre bébé sera parmi nous, et je découvre par hasard que ce sera finalement un petit garçon. Nous enchaînons la journée, un peu sonnés. Nous ne prenons le chemin de la maison que le soir. L'excitation de cette folle journée retombe. Je commence à réaliser. Je m'effondre. Je suis en larmes. Je me sens envahie par la tristesse et si vide à la fois. J'ai l'impression d'avoir perdu ma fille. Que ce petite garçon m'a enlevé ma petite Alice que j'attendais depuis 8 mois. Et puis ce garçon, qui est il ? Est ce que je vais arriver à l'aimer ? Je pleure beaucoup. Tout le week end. Une nouvelle semaine commence. Les premiers jours, je suis dans le déni. " Elle s'est forcément trompée ! Ils m'ont dit 3 fois fille et une fois garçon. Ce sera peut être une fille finalement. Tout n'est pas perdu." Puis la colère m'envahit : " Mais putain ! Comment ça se fait qu'ils puissent se tromper 3 fois ? " Le marchandage prend le relais : " Mais s'ils se sont trompés 3 fois, peut-être qu'ils se sont trompés cette fois-ci aussi ? Et s'ils sont capables de se tromper sur ça, peut être sont ils passés à côté de quelque chose de plus grave ? Et s'ils étaient passés à côté d'une malformation cardiaque ? " Et, d'un seul coup, je le ressens. Ca me fait mal. " On m'a enlevé ma fille. Ce garçon a fait mourir ma fille. " Cette étape laissera place enfin à l'acceptation. Petit à petit, je me raisonne : "Ok. Ce n'est pas une fille même si il y a 1 ou 2% de chance que ça soit quand même une fille. C'est un petit garçon en pleine santé. Fille ou garçon, peu importe tant que c'est un enfant en bonne santé." Durant cette semaine, je suis passée par de nombreuses phases. Les étapes du deuil. Je devais laisser mourir ma fille. Ce bébé que j'avais imaginé et attendu, pour faire de la place à ce petit garçon que je vivais comme un imposteur. Alors qu'en réalité, lui, était là depuis le début. Je suis aujourd'hui prête. Nous allons accueillir un enfant en pleine forme. Un petit garçon. Mais, j'ai une peur viscérale. Vais je réussir à aimer mon fils ? Mon mari est d'un incroyable soutien. Puis, sa garde robe à 90% de vêtements peu genrés m'aide également. Je donne les 10% restants à une amie. 10 décembre, 23h: Nous sommes aujourd'hui moins de 2 semaines après cette annonce explosive et ma poche des eaux se rompt. Je suis excitée et anxieuse à la fois : " Bon, allez, ben, c'est parti. Y'a plus qu'à. " Sur le chemin de la maternité, je demande à mon mari s'il a peur. " Non et toi ? " Oui. Oui j'ai peur de le rencontrer enfin. J'ai peur d'avoir mal. J'ai peur d'être une mauvaise mère. J'ai peur d'être nulle. J'ai peur de ne pas savoir accoucher. Et surtout, j'ai peur de ne pas arriver à l'aimer. C'est viscéral. Les heures passent mais le travail ne s'enclenche pas. Je suis aujourd'hui intimement convaincue que cet état d'esprit a joué sur l'accouchement. Je commence par une nuit de faux travail avec des contractions peu douloureuses, toutes les 7-8 minutes. S'en suit une journée de calme plat. Le calme avant la tempête. La nuit suivante sera bien plus douloureuse mais pas suffisamment efficace. 12 décembre, 9h: Je suis déclenchée par ocytocine. Je suis toujours dans le même état d'esprit. J'ai peur de rejeter mon bébé. J'en parle aux sages-femmes. Elles sont bienveillantes, adorables et m'accompagnent au mieux. L'heure de la rencontre approche. Une dernière poussée, et voilà mon bébé qui arrive. Les sages-femmes me laissent regarder. C'est bien un garçon. Il est 16h54, notre petit Raphaël est né. A l'instant, où on le pose sur moi, tous mes doutes s'envolent. C'était lui et personne d'autre ! Aujourd'hui, nous nous sentons chanceux. Chanceux d'avoir notre plus-si-petit Raphaël. Chanceux qu'il soit là et en bonne santé. Chanceux d'avoir bénéficié de cette échographie supplémentaire. Chanceux de ne pas avoir découvert cette surprise le jour de l'accouchement. Chanceux que cette expérience nous ait appris que nous n'avons pas besoin d'anticiper pour aimer.


55 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

Comments


bottom of page